Je vous ai déjà parlé de cette envie de nature, de forêts denses qui nous titille souvent dans notre quotidien citadin, cette curiosité de pousser la route jusqu’en Belgique pour découvrir des paysages encore bruts, comme les rochers de Freÿr ou les jolis points de vue qu’offrent les randos à Marche-les-Dames, près de Namur. À quelques heures de Lille, la nature de Belgique se révèle chaque fois un peu plus surprenante.

Comme décor de ce nouveau week-end à arpenter les sentiers : les forêts de l’Ardenne (bon à savoir si vous parlez avec des belges, la destination Ardenne, ne prend pas de « s » en Belgique, contrairement à la région française « Les Ardennes »). Au programme : randonnée, bivouac, écoute du brame du cerf et packraft. Une immersion dans la nature au début de l’automne, laissez-moi vous dire que tous les ingrédients étaient réunis pour que ces deux petits jours s’annoncent des plus ressourçants.


Le samedi matin, sacs sur le dos, on file direction le Plateau des Tailles, dont le sommet culmine à un peu plus de 600 mètres. J’ai été étonnée de savoir qu’ici, les hivers offrent souvent la possibilité de chausser ses skis pour des balades en ski de fond ou quelques petites descentes alpines. Mais cette fois-ci, pas de neige à l’horizon ce week-end de septembre, mais un beau soleil de la toute fin d’été pour assister au changement des saisons. On lace alors nos chaussures de randonnée pour entamer notre marche de 18km, les pas qui font craquer les feuilles de chênes et le nez pointé vers les aiguilles de pins de la canopée.



À peine quelques mètres en forêt suffisent pour se déconnecter. Ou plutôt, pour se reconnecter à l’essentiel, laisser nos sens dicter nos pensées. Une balade en forêt me fait toujours le même effet qu’une bonne séance de médiation : à l’écoute de son corps, on ouvre ses poumons pour les remplir d’un air nouveau et on laisse nos pensées aller et venir librement.

La Nature est belle. La rosée du matin s’est déposée sur les toiles d’araignées aménagées dans les herbes basses et le soleil qui rayonne les fait ressembler à des colliers de perles. Un peu plus loin, les castors ont bien travaillés, transformant le chemin en un ruisseau qu’il est ardu de traverser sans bottes de pluie. Heureusement, quelques mètres en contrebas, un tronc généreux sert de pont pour traverser sans difficultés. Les fougères sont déjà jaunies par endroit et l’on s’enfonce doucement dans la forêt qui respire. Si l’on tend un peu l’oreille, on peut même l’entendre parler. Le vent fait doucement valser les branches au dessus de nos têtes dans un murmure discret. La forêt enchante, envoûte. On avance, bercé.es par les lumières de l’automne sur les arbres qui commencent à roussir, percutant leurs ombres noires sur des lits de mousses vertes intenses.



Le bitume, les briques et les bruits de circulation loin derrière moi, je me suis laissée doucement enivrer par ces odeurs de mousses humides et de humus riche. Je suis retombée en enfance (un dimanche avec mes grands-parents, dans mes forêts d’Eure-et-Loir) en redécouvrant des cèpes énormes et des girolles par dizaines nichées au dessus de tapis verdoyants. Une cueillette généreuse que l’on dégustera le soir même autour du feu de camp.


Et l’immersion est totale, lorsque les brames des cerfs se font entendre à quelques mètres de nous pendant notre pause du midi. Leurs bois s’entrechoquent derrière les sapins, laissant imaginer un combat d’intimidation. Je n’avais jamais entendu ça et c’était un bonheur à vivre. Mes compagnons d’aventure, pourtant plus habitué.es à venir en forêt pendant cette période de rut, sont tout aussi étonné.es que moi de les entendre si proches en plein après-midi. Alors, à pas feutrés, on s’approche pour essayer de les observer dans une zone un peu dégagée de la forêt. Les pas sont peut-être un peu hâtifs, et j’aperçois seulement les bouts des bois du cerf s’éloigner dans les sapins. On est repéré.es par les trois biches qui l’accompagnent. Une première rencontre trop furtive mais qui laissait présager une journée riche en surprises. En reprenant le chemin, on repère rapidement des traces de sabots dans la terre humide, et mon cœur s’accélère de pouvoir presque les suivre à la trace. Tout au long de notre rando, j’ai vécu des instants magiques que j’ai été bien incapable d’immortaliser avec mon appareil photo : ces rencontres fugaces avec les animaux de la forêt. Des biches que l’on observe courir à travers les arbres, un chat sauvage, un chevreuil, une harde de sangliers qui traverse le chemin juste devant nous… Les yeux aussi grands ouverts que ma bouche, j’ai gravé ces moments précieux qui n’appartiennent qu’à la forêt…

Si ça vous dit, Maxime nous a concocté le tracé de la randonnée sur le Plateau des Tailles. Attention de bien respecter les indications concernant les horaires de chasse si vous décidez d’aller randonner pendant la période.

Les muscles un peu endoloris, il nous faut à peine 10 minutes pour monter nos tentes sur l’aire de bivouac des Tailles, à Houffalize, avant de s’ouvrir une Chouffe, la base après une randonnée en Belgique ! Autour du foyer brûlant qui réchauffe les corps fatigués, familles et randonneurs se regroupent tour à tour pour s’occuper des braises qui crépitent dans la nuit. La chaleur est réconfortante, la danse des flammes, hypnotique. Le photographe et vidéaste Martin Dellicour, nous rejoint pour partager le repas et nous raconter la passion qui l’anime à chacune de ses escapades en forêt, à l’affût des cerfs et des animaux, qu’il attend patiemment, chaque automne aux aurores. À travers une série de portraits-documentaires sur les artisan.es et passionné.es de la région, il nous invite – avec son équipe – à ouvrir grands les yeux sur l’authenticité de l’Ardenne sauvage. Le premier épisode est à découvrir juste ici, j’ai adoré la justesse et les ondes qui s’en dégagent (même qu’il y’a des castors vraiment trop choux dedans). Ce soir-là, nous sommes huit autour du feu sous les étoiles, à discuter jusque tard, nous interrompant seulement pour écouter attentivement les brames qui résonnent au loin…

 

Le réveil est difficile, malgré la nuit chaud dans nos igloos. Les brames de cerfs ont retenti partout dans la vallée, c’était assez fou de les entendre si proches sans pouvoir les voir ! J’ai plus d’une fois eu l’envie folle de m’échapper du cocon de mon sac de couchage pour aller les observer, mais le sommeil, la flegme, et le froid étaient toujours plus forts ! Ce matin, encore toute fatiguée de la nuit en pointillée, j’ouvre les yeux sur les lumières d’un matin d’automne. Les cerfs se font plus discrets, mais la magie est toujours là.

 

La lumière perce les nuages pour diffuser son éclat sur une campagne un peu endormie, encore recouverte de son manteau brumeux de la nuit. Le paysage se dessine en ombres chinoises ce matin. Je chante Octobre. L’automne est bien là et j’ai envie de faire durer ce moment un peu plus longtemps…

 

 


On a repris la route pour le Lac de Nisramont, nos sacs à dos chargés d’à peine trois petits kilos supplémentaires. C’est parti pour 1 heure de marche à travers les ombres de la forêt, avec quelques points de vue sur le lac aux couleurs de l’automne. Il y’a un peu de monde sur le sentier, mais nous seront bientôt seul.es à profiter du lac avec nos packrafts : des kayaks gonflables qui tiennent dans nos sacs à dos ! On déplie notre embarcation et on la gonfle grâce à un ingénieux système de poche d’air avant de pouvoir se jeter à l’eau. Les débuts sont un peu hésitants, je me demande si c’est vraiment stable. Et si j’ai mal fermé la valve ? Et s’il y’a un trou ? J’oublie bien vite toutes ces questions et apprécie de me laisser porter par l’eau tout doucement. Même pas besoin de forcer sur les bras, le kayak est si léger que l’on avance sans difficultés, tout en reposant l’esprit et les gambettes. Le soleil, les arbres roux et une balade sur l’eau, le lac de Nisramont avait des allures de Canada ce jour là.

 



Luc propose de randonnées-packraft à travers le massif ardennais, pour naviguer sur des rapides ou plus calmement sur des lacs et rivières. Le concept vient tout droit d’Alaska et c’est vrai que l’on se sent un peu comme des aventurier.ères en découvrant, depuis l’eau, les paysages escarpés du Parc Naturel des Deux Ourthes. // Pack and Raft  – 42€ la journée complète avec pique-nique.

Et si c’était ça le bonheur ? Celui de retrouver le rythme lent qu’impose la nature, quand tous les jours de la semaine passent à la cadence des clients, des projets et du quotidien ? Que faisons-nous du temps qui défile à toute allure, alors qu’il suffit parfois, seulement de marcher en forêt, glisser sur l’eau, pour prendre conscience de la véritable valeur d’une heure, d’une journée ?


Avant de reprendre la route pour Lille, nous nous sommes dit au revoir autour d’une bière à la Brasserie Lupulus. Julien Gobron est tombé dans la cuve quand il était petit, son père a créé la fameuse Chouffe. Et c’est en 2007 qu’il crée avec ses deux fils, la bière de la Brasserie des 3 Fouquets, la Lupulus, en référence aux loups qui peuplaient cette région d’Ardenne (le nom latin du houblon est Humulus Lupulus, qui signifie « petit loup humble »). Sur place, dans le bar ou le jardin de la brasserie à Gouvy, on peut se délecter d’une blonde fraiche et légère après une journée au grand air, d’une brune aux notes d’agrumes, une triple bio ou encore d’une bière d’hiver – l’Hibernatus – aux notes de cannelle que j’espère vite pouvoir goûter dans les bars Lillois !



 

 

Quand l’invitation de Visit Ardenne – avec comme sujet de mail « Into the Wild »  – a atterri dans ma boite, je n’ai pas hésité très longtemps à vouloir en découvrir encore un peu plus. Vous avez été nombreux à réagir à mes stories sur instagram et à me demander plus d’infos, alors j’espère que désormais vous inscrirez l’Ardenne dans votre liste des destinations pour vous évader ! Comme d’habitude, je reste libre du contenu que je partage par ici. Merci à Julien, Maxime, Pauline et Fred et Karl pour m’avoir fait découvrir un bout de leur Belgique adorée avec passion et bonne humeur :)

Destination Ardenne – Au rythme de la nature ????‍♀️ @Ardenne_Tourism Share on X

 

 

 


Le bivouac est formellement interdit en Belgique, mais plusieurs aires de bivouac sont recensées par Escapardenne. Elles permettent de profiter légalement d’une nuit dans la nature avec le minimum (mais le plus important lorsque l’on dort dehors) : un foyer ! Bien évidemment, on ne laisse rien trainer sur place et on emporte ses déchets (si on a su porter des bouteilles pleines, on peut bien les porter vides !) et on peut même être sympa en laissant du petit bois pour les prochains campeurs.
Lors de ce week-end, nous avons pu tester la tente Quick Hiker 2 de Quechua. Compacte et facile à monter (bien que je galère un peu toujours avec les arceaux qui se croisent ^^) elle est encore plus pratique à replier. À conseiller pour une personne avec un gros sac à dos ou deux personnes pas trop chargées. Pour deux personnes et deux gros sacs je recommande plutôt la Quick Hiker 3 que nous avions en Écosse. Mieux vaut prévoir un petit matelas de bivouac (550g seulement) mais ne pas lésiner sur le sac de couchage : même si le temps est plutôt clément la journée, l’automne apporte avec elle son froid et son humidité la nuit.
Merci à Maxime qui nous a préparé le tracé de la randonnée sur le Plateau des Tailles, et pour une excursion en packraft, contactez Luc de Pack and Raft.
Si vous souhaitez passé un week-end avec un peu plus de confort, vous trouverez facilement des logements dans la région. Nous avons dormi à l’Hôtel Val de Poix que je recommanderai surtout pour leur très bon (et beau) bar-restaurant Les Gamines, qui propose une belle sélection de bières et où j’ai découvert la croquette de fromage, une spécialité belge bien gourmande ! Enfin, si vous voulez profitez de la forêt mais sans pour autant sacrifier votre confort, je vous conseille d’aller faire un tour sur le compte instagram de Laëtitia qui a trouvé une bien jolie cabane dans les forêts d’Ardenne.
Les visites et dégustations à la Brasserie Lupulus se font les samedis et dimanches, vous trouverez toutes les informations sur le site de la Brasserie.